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ÀMA GLORIA

En inscrivant son deuxième long-métrage en solo entre le documentaire et la fiction, Marie Amachoukeli confirme son talent de conteuse d’émotions. Un film magnifique écrit à cœur et corps d’enfant.

 

Tout le monde se souvient du flamboyant Party Girl. C’est cette fois seule que Marie Amachoukeli s’embarque dans cette magnifique histoire d’amour entre une petite fille qui n’y voit pas trop clair, et sa nounou, originaire du Cap Vert, et qui n’y voit plus très clair non plus sur ce qu’elle continue de faire en France. Elle projette de construire un hôtel près de la mer, et c’est le décès de sa mère qui la décide à quitter l’Île-de-France, laissant la petite Cléo en plein désarroi. Ama Gloria est un film simple, humaniste, qui n’a pour seul objet que d’appréhender la relation quasi filiale entre une nourrice et une enfant. Le récit ne recherche ni effet d’annonce, ni pathos. La caméra et la mise en scène proprement lumineuse sont au service de ce petit bout de vie, en la personne de Cléo, et la force maternelle de Gloria.

 

Marie Amachoukeli avait déjà démontré son immense talent de conteuse des gens ordinaires en mettant en scène avec Samuel Theis et Claire Burger, une professionnelle non du cinéma mais des cabarets. Ici, la réalisatrice met en scène un tout petit bout de bonne femme : Louise Mauroy-Panzani. La gamine semble s’être glissée dans la peau de son personnage mieux qu’un poisson dans l’eau. Elle est engagée dans cette relation avec sa nounou, comme s’il s’agissait d’elle-même et que toute son existence future dépendait de cette femme noire, audacieuse et généreuse. À ses côtés, la comédienne plus âgée ne démérite jamais. Elle incarne une femme arrivée en France par la mer et qui n’est jamais parvenue à se trouver un sens entre son pays d’accueil et celui qu’elle a laissé derrière elle. Elle n’a pas élevé ses enfants au Cap Vert et ces derniers lui font ressentir la trahison maternelle à leur égard, quand en plus ce sont les habitants qui lui reprochent de n’être plus tout à fait capverdienne.

 

La réalisatrice insère dans son long-métrage des petits films d’animation qui retracent sans doute ce qui pourrait être le plus dramatique dans le récit. Justement, le choix de l’animation permet de faire des pas de côté et de ne pas céder aux sirènes du mélodrame. On ne retient plus qu’une chose : l’enfance merveilleuse qui se dégage de Cléo et l’amour débordant que Gloria lui apporte. Ama Gloria est un film d’amour pour les amoureux des gens simples, sincères, engagés à chaque instant dans leur parcours de vie à transmettre du bonheur.

(Laurent Cambon, Avoir à Lire, publié le 19/05/2023)