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SANTOSH
La réalisatrice Sandhya Suri met en scène une héroïne se débattant avec son désir de liberté dans un polar aux enjeux féministes.
Parfois, mais c’est très rare, la fantaisie est plus du côté du réel que de la fiction. C’est le cas avec Santosh, premier film de fiction de l’Indienne Sandhya Suri. Il a en effet pour point de départ une véritable loi indienne, dite de “nomination compassionnelle”, qui permet aux personnes qui étaient à la charge d’agents de police décédés d’hériter de leur emploi. C’est ce qui arrive donc à Santosh qui, à la mort de son mari, passe de son train-train d’épouse au foyer à une vie de policière chargée d’enquêter sur le féminicide d’une jeune paysanne issue de la caste des intouchables.
Son tout premier contact avec l’exercice de la loi symbolise ce que ce polar dépliera par la suite de façon quelque peu programmatique : la justice pour les femmes n’est qu’une parodie et s’accomplit sur le dos des plus faibles. On est quelque part entre Serpico de Lumet et Chinatown de Polanski, mais du point de vue d’une femme perdue dans l’Inde rurale du Nord. Le film, qui épouse son regard, se découpe en deux mouvements à la dynamique inverse.
Espoirs de justice et violence des castes
Durant le premier, Santosh découvre une forme de jouissance de l’uniforme et de l’exercice du pouvoir policier, nuancée par la reproduction du sexisme au sein des forces de l’ordre. Couvée par sa charismatique supérieure Sharma, elle se sent investie d’une mission féministe et semble soudain trouver un sens à sa vie, ainsi qu’une place dans une société indienne particulièrement misogyne.
Tout bascule pourtant dans la seconde moitié du film, où ses espoirs de justice se heurtent à la violence des castes et où elle comprend que l’uniforme, ça rend con·ne, et que son simulacre de revanche féministe se fait au prix d’injustices connexes, notamment islamophobes, autre fléau de la société indienne.