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UNE BATAILLE APRÈS L’AUTRE
Cet excellent divertissement signé Paul Thomas Anderson est conçu de remporter de nombreuses statuettes notamment pour Sean Penn et Leonardo DiCaprio.
Paul Thomas Anderson n’y va pas avec le dos de la cuillère pour Une bataille après l’autre. Son adaptation d’un roman de Thomas Pynchon dont il avait déjà porté à l’écran Inherent Vice en 2015, envoie du bois. Il remet aussi sur le devant de la scène deux immenses acteurs – Leonardo Di Caprio et Sean Penn – qu’on n’avait pas vus aussi habités par leur rôle depuis fort longtemps. Steven Spielberg lui-même a adoubé le film qu’il a qualifié de « dément ». Il l’a comparé au Docteur Folamour de Stanley Kubrick pour la façon dont il mêle humour absurde et réflexion politique.
Un Oscar – ou plus – pour Paul Thomas Anderson
Paul Thomas Anderson ( « PTA » pour ses nombreux fans) mérite tout simplement les trophées des Meilleurs film, réalisation et scénario adapté. Le réalisateur de Phantom Thread, Magnolia et Licorice Pizza a bénéficié d’un budget énorme – entre 110 et 140 millions de dollars – pour orchestrer des séquences d’action au service d’intrigue jouissive. A l’origine, le récit se déroulait pendant les années Reagan. Le fait qu’il soit transposé de nos jours rend sa résonance politique d’autant plus forte. Ce pied de nez à l’administration Trump a tout pour séduire des votants qui ne portent pas l’actuel Président des Etats-Unis dans leur cœur.
Leonardo DiCaprio est génial dans sa robe de chambre à carreaux ! Son sens de l’autodérision fait mouche dans la peau d’un gars dévoué mais pas forcément très finaud. Il est à la fois tête à claque et sympa et semble bien parti comme Meilleur acteur 2025. Sean Penn, lui, fait vraiment peur en militaire prêt à tout pour être admis dans une organisation secrète de blancs riches et racistes. Avec ses cheveux rasés, sa silhouette frêle et son regard fou, il apporte une telle intensité à son personnage qu’on se sent mal dès qu’il apparaît. Le trophée du second rôle est pour lui. Il vole la vedette à Benicio del Toro en militant débrouillard et maître d’arts martiaux. Ce dernier n’a donc que donc peu de chance de l’emporter malgré la qualité de sa prestation.
Des Oscars pour ces dames
Retenez bien le nom de Chase Infiniti ! Cette actrice de 25 printemps, qui trouve ici son premier grand rôle, est purement et simplement exceptionnelle dans le rôle d’une étudiante kidnappée en raison du passé de son père. Ce serait merveilleux de lui voir attribuer un Oscar tant elle vibre de naturel et de charisme. Elle ne reste pas comme une potiche à attendre qu’on vienne la sauver mais livre une composition d’héroïne moderne remarquable. Du côté des seconds rôles, Regina Hall, toujours aussi resplendissante, ou la découverte Shayna MacHayle étonnante en militante, sont également bien placées.
Une bataille après l’autre ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Comment ne pas souligner le travail ahurissant fourni par le chef-opérateur Michael Bauman et le caméraman Colin Anderson. Le chef-op avait déjà travaillé avec PTA sur The Master (2012) et Licorice Pizza (2022) et se surpasse dans cette nouvelle collaboration. Précisons que le réalisateur a choisi de tourner en VistaVision, un format horizontal obligeant le technicien à travailler avec un matériel lourd très inconfortable et de la pellicule.
Et pour quelques Oscars de plus
Le jeu en valait la chandelle : l’image est sublime avec suffisamment de grain pour la rendre organique. Rien à voir avec le numérique un peu impersonnel, ni avec L’IA dépourvue d’âme. Ce choix est tout aussi esthétique que politique. Et cela d’autant plus que l’ensemble est soutenu par la partition de Jonny Greenwood qui n’aurait pas volé son Oscar lui non plus.
(Caroline Vié, 20 Minutes, publié le 22/09/2025)