Ce film d’animation sensible donne une nouvelle vie au merveilleux roman de l’écrivain britannique Michael Morpurgo, un auteur phare de la littérature jeunesse contemporaine.

Adapté d’un roman de Michael Morpurgo, publié en Grande-Bretagne en 1999 et recommandé par l’Éducation nationale, Le Royaume de Kensuké raconte les aventures d’un Robinson Crusoé des temps modernes.

Michael embarque sur un voilier avec ses parents et sa sœur aînée pour un tour du monde. Le garçon s’ennuie à bord, peu emballé par cette aventure, d’autant que ses parents ont décidé de laisser à terre sa chienne Stella. Mais un soir de tempête, alors qu’il veut libérer Stella, qu’il a embarquée en secret, il passe par-dessus bord… Sauvé des eaux, il échoue sur une île perdue au milieu du Pacifique.

Seul avec sa chienne, sans eau et sans nourriture, Michael se sent perdu. Un matin, au réveil, il découvre un plateau avec de quoi boire et manger. Le rituel se répète chaque matin jusqu’à ce que l’homme providentiel se fasse connaître. Il s’agit d’un vieux monsieur prénommé Kensuké. Cet ancien soldat a pris racine, seul, sur cette île, où il vit en parfaite harmonie avec la nature et les orangs-outangs…

Adaptation fidèle du quatrième roman de Michael Morpurgo (il en a publié 150, vendus à 35 millions d’exemplaires dans le monde), Le Royaume de Kensuké embarque le spectateur dans une aventure pleine de rebondissements, que l’on vit avec les yeux du jeune Michael. Chien fou au début du récit, Michael s’assagit au fil de son aventure. Après sa rencontre avec le vieux sage Kensuké, le garçon prend peu à peu conscience de sa place dans le monde, et réalise son attachement à sa famille, qu’il a perdue.

Avec Kensuké, Michael apprend à tenir compte de l’autre. Il lui faut de la patience et de la délicatesse pour apprivoiser ce vieux bonhomme solitaire, fracassé par la vie, seul depuis 30 ans. Récit initiatique, Le Royaume de Kensuké est aussi une méditation sur la famille, qui prend ici toutes sortes de formes, et sur la relation à l’autre, quel qu’il soit. Hymne à la paix, le récit invite à réfléchir à la place de l’humain sur une terre que les hommes partagent si mal.

Cette vision idyllique est incarnée par le « royaume » de Kensuké, cette extraordinaire maison qu’il a construite dans les arbres et qui apparaît comme une excroissance de la nature. Cette idée est aussi présente à travers la relation que Michael entretient avec sa chienne Stella, mais aussi dans le contact doux et plein de respect mutuel de Kensuké avec ses voisins les orangs-outangs, devenus sa deuxième famille, et enfin, bien sûr, dans la relation entre ces deux âmes perdues au milieu de l’océan.

Dessin et estampe

« Le message que j’aimerais que le spectateur retienne du film, c’est l’importance de l’amour entre les êtres, entre les peuples, et entre l’homme et la planète. C’est, au fond, une histoire qui parle de réconciliation, entre les jeunes et les anciens, entre l’être humain et le monde qui l’entoure, perceptible à travers le prisme de Michael, mais aussi à travers la sagesse de Kensuké et la relation entre le petit garçon et le vieil homme », explique Michael Morpurgo, qui s’est dit « époustouflé » par l’adaptation de son roman. L’écrivain de 80 ans accueille depuis les années 1970 des enfants des quartiers défavorisés dans des fermes pour les familiariser avec la nature.

Toute cette histoire est mise en images dans un graphisme classique et plaisant, avec des personnages vivants et des décors somptueux. Une bonne partie du film se passe de mots, les images et la mise en scène prenant pleinement le relais (c’est une des grandes réussites de cette adaptation). À noter pour finir la belle idée de passer par le dessin à l’estampe, que pratique Kensuké, pour raconter l’évolution de la relation entre Michael et le vieil homme, mais aussi et surtout pour figurer la tragédie de Nagasaki dans une scène bouleversante. Un magnifique film d’animation, à partager en famille.

(Laurence Houot, FranceInfo Culture, publié le 04/02/2024)